Maladie cœliaque

Introduction

La maladie cœliaque est une entéropathie auto-immune qui provoque une destruction des villosités de l’intestin grêle (atrophie villositaire) en rapport avec l’ingestion d’un antigène alimentaire : le gluten. Si les mécanismes de la maladie sont bien connus, son diagnostic est insuffisant et ses complications peuvent être graves.

Epidémiologie

Les données épidémiologiques réalisées sur des échantillons en population générale montrent qu’il s’agit d’une maladie relativement fréquente présente chez 0,5 à 2% de la population générale. La maladie est deux à trois fois plus fréquente chez la femme que chez l’homme. Elle est présente dans tous les pays européens, en Amérique du Nord et en Amérique du Sud, en Asie et en Inde. Le seul pays épargné serait le Japon en raison probablement d’un phénotype génétique de prédisposition absent. Il n’y a pas de données en Afrique Noire mais la maladie est très fréquente en Afrique Sub-saharienne. Les données épidémiologiques françaises sont anciennes et font état d’une prévalence de la maladie dans une cohorte de patients du Nord de la France (Cohorte MONICA) de l’ordre de 1/285. La maladie peut se révéler à tout âge avec des formes pédiatriques révélées précocement dans l’enfance ou au moment de l’adolescence, des formes révélées à l’âge adulte, le plus souvent entre 20 et 40 ans mais avec 20% actuellement de formes tardives diagnostiquées après l’âge de 60 ans. Il n’existe pas de données scientifiques concernant le lien entre l’augmentation de la fréquence de la maladie observée depuis 50 ans et des modifications des habitudes alimentaires ou la modification de la composition du gluten.

Il s’agit d’une maladie auto-immune avec induction d’un processus inflammatoire intestinal conduisant à la destruction progressive des villosités intestinales responsable d’une malabsorption et de complications potentiellement graves à long terme.

Diagnostic

La difficulté du diagnostic repose probablement sur l’hétérogénéité très forte des signes cliniques pouvant révéler la maladie cœliaque. Il existe des formes typiques avec diarrhées, perte de poids, signes de malabsorption de l’intestin grêle (anémie, carence en protéines) qui sont souvent diagnostiqués rapidement. Dans la majorité des cas environ + de 80 %, les signes cliniques sont atypiques tels qu’une anémie isolée par carence en fer ou en vitamine B12, une fatigue, des troubles intestinaux ressemblant au syndrome de l’intestin irritable (alternance diarrhées, constipation, ballonnements) des douleurs osseuses, une déminéralisation osseuse. Dans ces cas-là, le diagnostic est souvent plus tardif. Enfin, de plus en plus de cas sont diagnostiqués dans le cadre d’un dépistage familial et ne présentent que peu ou pas de symptômes cliniques.

Le diagnostic repose sur la détection d’anticorps sériques (anticorps anti-transglutaminases de type IgA positifs) et la présence de lésions intestinales à type d’atrophie villositaire associée à une augmentation des lymphocytes intra-épithéliaux sur les biopsies duodénales réalisées lors d’une gastroscopie. Chez l’enfant le diagnostic de certitude, en cas de symptômes typiques, repose uniquement sur la présence d’anticorps anti-transglutaminases sériques à plus de 10 fois la normale et ne nécessite pas une confirmation par des biopsies.

Après le diagnostic de maladie cœliaque, il est habituel de réaliser un bilan pour rechercher des signes indirects de malabsorption (anémie, carence en calcium ou en protéines), et une recherche également de déminéralisation osseuse par une ostéodensitométrie osseuse. Le traitement repose sur l’exclusion du gluten de l’alimentation (blé, seigle et orge). Ce régime sans gluten est néanmoins difficile à suivre en pratique courante (restaurant, collectivité locale, accès à des produits sans gluten de qualité). Il est estimé que seulement 50% des patients atteints de maladie cœliaque suivent strictement le régime sans gluten compte tenu des contraintes sociétales, des coûts.

Le régime sans gluten permet une amélioration des symptômes cliniques deux à six mois après l’instauration de celui-ci et une repousse villositaire avec normalisation des anomalies intestinales après 12 à 24 mois de régime sans gluten.

Dans environ 5% des cas, il existe des résistances au régime sans gluten avec absence de repousse villositaire et persistance des symptômes. Cette résistance au régime sans gluten peut être associée à la survenue d’une complication rare mais grave qui est le lymphome T intestinal ou la maladie cœliaque réfractaire. Ces entités nécessitent pour leur diagnostic une analyse poussée, phénotypique et moléculaire pour permettre un diagnostic et un bilan. Le traitement de ces complications lymphomateuses reposent le plus souvent sur des chimiothérapies intensives, avec autogreffe de moelle et anticorps monoclaux et utilisation d’anticorps monoclonaux ciblés.

Enjeux et Perspective

Si l’utilisation du régime sans gluten est actuellement très médiatisée, seule la maladie cœliaque prouvée, devrait bénéficier d’un traitement par un régime sans gluten strict et définitif. Compte tenu du caractère protéiforme des symptômes de la maladie, des manifestations variables de révélation, le diagnostic est souvent non réalisé ou trop tardivement réalisé. Un diagnostic précoce permettrait sans doute d’éviter des complications graves que sont la déminéralisation osseuse, la survenue d’autres maladies auto-immunes associées (thyroïdite, diabète insulino-dépendant) et les complications carcinologiques telles que l’adénocarcinome et surtout le lymphome intestinal. Une sensibilisation des médecins généralistes et non gastroentérologues permettrait sans doute des gains diagnostiques, puisque le diagnostic est simple et repose sur la détection d’anticorps anti-transglutaminases de type IgA. Le seul traitement connu des formes non compliquées est le régime sans gluten. Cependant compte tenu de la difficulté d’observance d’un régime strict de longue durée, des traitements alternatifs ou préventifs sont en cours de développement mais n’ont pas fait à l’heure actuelle preuve de leur efficacité. Un réseau dédié pour la prise en charges formes lymphomateuses associées à la maladie cœliaque a été mis en place par l’Institut National du Cancer et labélisé dans les réseaux Cancer rare (CELAC coordination Professeur Christophe CELLIER à l’Hôpital Européen Georges Pompidou Paris).

MOTS CLÉS

  • Maladie cœliaque ou intolérance au gluten.
  • Entéropathie auto-immune.
  • Diagnostic par anticorps anti-transglutaminases et biopsies duodénales.
  • Complications de la maladie cœliaque : ostéoporose, maladies auto-immunes, adénocarcinome du grêle et lymphome de l’intestin grêle.
  • Le seul traitement efficace, régime sans gluten (observance difficile).

Références Majeures

  • Al-Toma A, Volta U, Auricchio R, Castillejo G, Sanders DS, Cellier C, Mulder CJ, Lundin KEA. European Society for the Study of Coeliac Disease (ESsCD) guideline for coeliac disease and other gluten-related disorders. United European Gastroenterol J. 2019 ;7(5):583-613
  • Green PH, Cellier C. Celiac disease. N Engl J Med. 2007: 25;357(17):1731-43.
  • Cellier C, Bouma G, van Gils T, Khater S, Malamut G, Crespo L, Collin P, Green PHR, Crowe SE, Tsuji W, Butz E, Cerf-Bensussan N, Macintyre E, Parnes JR, Leon F, Hermine O, Mulder CJ; RCD-II Study Group Investigators. Safety and efficacy of AMG 714 in patients with type 2 refractory coeliac disease: a phase 2a, randomised, double-blind, placebo-controlled, parallel-group study. Lancet Gastroenterol Hepatol. 2019 ;4(12):960-970.